Exposition « Cim i tomba »

Les Arts en ballade Toulouse 2018

Le cim i tomba, qu'es aquo ?

Et bien il s'agit de la spécialité culinaire de Tossa de Mar, une cité fortifiée du littoral catalan, et que l'on ne peut déguster ailleurs !

C’est un plat basé sur l'alliance fondamentale entre le poisson, l'ail, l'oignon et la tomate : a priori, une recette typiquement méditerranéenne. Mais il a une saveur tout à fait particulière et incomparable. Son secret tient dans un tour de main original transmis par les pêcheurs de la ville. Ceux-ci n'avaient pas toujours le temps de cuisiner à bord, aussi retournaient-ils le contenu du plat sur le feu à mi-cuisson afin de mieux répartir l’apport de chaleur entre le haut et le bas. Le tout donne un résultat somptueux digne des meilleures paellas et fideuas. Le nom de cim i tomba vient donc de ce procédé : une sorte de retournement du haut (cim) vers le bas, la tomba désignant l'action même de la chute et du retournement.

La rencontre avec ce fait culturel s’est produite pour moi à l’occasion de retrouvailles familiales précieuses, dans le calme d'une arrière saison catalane et cela dans une phase de convalescence post-opératoire. Cette correspondance digne des meilleurs alignements astraux a, de plus, coïncidé avec un regain de créativité picturale qui m’a permis de réaliser la majeure partie de cette exposition. Le titre de cette exposition est donc un rappel de ce moment heureux, et son résultat une modeste invitation à son partage.

Il correspond de plus au retournement de tableau, pour moi fréquent dans son élaboration afin de ne pas privilégier un sens de composition et de lecture. Ou comment une horizontalité initiale, une stratification possiblement réputée stable, se transforme en une dimension verticale propre aux abimes et autres effondrements, mais aussi à une aspiration vers le haut. Dali le disait bien : l'hélicoptère et le sous-marin étaient selon lui deux inventions espagnoles permettant d'accéder aussi bien aux altitudes célestes qu’aux profondeurs abyssales !

Quoi qu'il en soit, nécessaire est cette prise de risque et l'intranquillité produite par ce renversement. A l'instar d’un mouvement convectif orageux produit par un courant froid précipitant il peut constituer un élément déclencheur, nouveau point d'appui dans la recherche d’une vision autre.

Emmanuel Celhay

El cim i tomba, qu’es aquo* ?

Se trata de la especialidad culinaria de Tossa de mar, una ciudad fortificada en el litoral catalán, y que solamente se puede degustar allí.

Es un plato basado sobre la alianza fundamental entre pescado, ajo, cebolla y tomate : a priori, una receta típicamente mediterránea, pero tiene un savor extremadamente particular e incomparable. Su secreto proviene de una astucia original transmitida por les pescadores de la ciudad. Ellos no disponían siempre del tiempo necesario para cocinar a bordo, entonces davan vuelta el contenido del plato sobre el fuego a la mitad de la cocción para repartir el aporte del calor entre arriba y abajo. El todo da un resultado suntuoso digno de las mejores paellas y fideuas. El nombre de Cim i tomba proviene así de ese procedimiento : una especie de « dada vuelta » de lo arriba (cim) hacia el abajo, la « tomba » designando la acción misma de la caída y de la dada vuelta.

Mi encuentro con ese hecho cultural se produjó en una ocasión de preciosos encuentros familiares, en una calma de un otoño catalán y todo en una fase mía de convalescencia post-operatoria. Esta correspondencia digna de los mejores alineamientos astrales coincidió, además, con una recuperación de energía de creatividad pictural que me permitió realizar la mayor parte de esta muestra. El título de esta muestra es entonces un recuerdo de un momento feliz y su resultado una modesta invitación a compartirla.

Sea lo que fuera, la toma de riesgo y la intranquilidad producida por esa « dada vuelta » son necesarios. A semejanza de un movimiento convectivo tormentoso producido por una corriente fría precipitante, esa « dada vuelta » puede constituir un elemento desencadenante, un nuevo punto de apoyo en la búsqueda de una visión otra.

* expresión occitana ; en castellano : El Cim i tomba, qué es ?

Emmanuel Celhay

(traducción Stella Buna)

Exposition « Quadrature »

La Conserverie Castelsarrasin 2015

Le parti pris pictural est celui de la liberté : celle de l'intention et celle du regard. Ainsi se trouve-t-on souvent à la limite entre figuration et non-figuration, balancé entre la construction féconde et, comme disait Rimbaud, la « défaite sans avenir » du délitement.

L’éphémère des mouvements spatiaux, la disparité des combinaisons biologiques et organiques, se conjuguent alors dans un renversement d'échelle avec l'espace géologique ou cosmique. Sans doute cela traduit une aspiration vitale fondamentale, une régénération associant les turbulences fluides, les magmas telluriques ou spatiaux.

Et puis il y a le temps chronologique suggéré par une stratification qui permet l’obtention d’une profondeur visuelle sans pour autant avoir recours à la perspective.

Le résultat se veut l’expression de la seule issue trouvée dans la finitude de la toile en permettant ainsi d’espérer, toujours selon le même Arthur, que soit « vu quelquefois ce que l’homme a cru voir ».

Emmanuel Celhay

Exposition « Le chaud et le froid »

Espace Météo Toulouse 1996

Depuis 1991, nous n'avions pas vu d'exposition d'oeuvres d'Emmanuel Celhay à Toulouse.

Les tableaux présentés ici ont été réalisés ces trois dernières années. Le thème annoncé : « Le chaud et le froid » ne doit pas être pris trop à la lettre. Pour moi, la richesse, l'ardente profusion de la palette, en appellent plus sûrement à la violence estivale qu'à la sécheresse de l'hiver !

Mais il est vrai qu'il s'agit d'oppositions ici de tensions, voire de fractures. Un fascinant maelström de couleurs (bleus, ocres, rouges, verts) crée, sans le secours de la traditionnelle perspective, un espace, une profondeur. Si bien que l'oeil s'habitue progressivement à ces fuites, ces tourbillons, ces gouffres, cette fluidité – (plus ou moins convulsifs suivant les œuvres) – qui imposent comme un mouvement permanent « creusant » littéralement la toile…

Les titres ne sont pas arbitraires : « Chaos », comme des plaques tectoniques préparant des « Séismes », « Tourbillon », « Coeur battant », « Espace »…

Et la chaleureuse série de « Lueurs » et des « La Brunie » - (hommage apaisé à des chanteurs et amis du peintre) – ne contredit pas, même si elle la tempère, la véhémence de l'ensemble.

J'ai beaucoup aimé « Fracture », « Convergence », « Scories » (beaucoup!).

Mais plus encore, peut-être, l'unité de l'ensemble exposé. Comme s'il s'agissait d'une « période », d'une époque du travail du peintre.

Ce qui nous laisse espérer que d'autres époques suivront, toujours nouvelles. Tant il est vrai qu'Emmanuel Celhay évolue, change, avance.

Parcours fécond qui mérite d'être salué.

Gilbert Baqué

Les Nouvelles 31

Il y a d'abord de grandes toiles où la peinture est comme de la lave en fusion, - le tourment minéral et spatial des couleurs, le tourbillon concentrique ou déconcentré du pinceau. Tête d'étranges comètes telluriques, empreinte un rien détournée de photos satellites qui sonderaient a contrario les profondeurs du magma.

La création artistique correspond ici à la création d'un monde ou à sa destruction. Les forces mises en présence, - ces rouges sombres retravaillés comme au couteau démentiel d'un démiurge, ce bleu cristallin d'une mer en devenir, ces jaunes qui prennent feu au contact du noir, ce vert naissant d'une photosynthèse contrariée -, s'affrontent dans un tournoiement de spirales et d'éclats. A moins qu'il n'existe aucun commencement, ni aucune fin à cet univers en fusion, mais un état changeant, chaotique, fracturé, une modification incessante où rien ne se construit, si ce n'est pour se reconstruire, se métamorphoser avec violence.

Il y aurait là un coeur sentimental, une Maja nue et flamboyante, des corps-tiroirs, le dos d'un oiseau ou celui d'une femme, un masque africain, la courbe d'une nageoire. Mais sous la forme d'indices imprécis, tête-bêche, placés là par le trait libre, offerts à notre regard qui recherche un « point de repaire », une génèse chronologique, de fugitives filiations.

Or, au loin, à distance, -là où chaque tableau prend surréellement forme – tout disparaît pour se fondre dans un vaste mouvement perpétuel, une tectonique des couleurs qui donne sens à la démarche artistique. C'est bien dans le recul physique que l'agression de la palette existe pour elle-même, que l'instant où tout a échappé se manifeste. Là, cet univers géologique en formation permanente, ce cosmos souterrain, caverneux, chaotique où viennent se confronter à leur grè les éléments fondateurs et destructeurs du monde.

Rares sont ces moments de beauté violente, ces instantanés criants une vérité insoutenable.

Merci.

Christine Michon

Exposition « Groupe Formes »

Palais des Festivals Biarritz 1993

Dans son travail il semble qu’il concentre son effort sur la maîtrise des couleurs et le mouvement. Dans les différents formats qu’il propose, les tons ardents scandent la toile en accents vifs, en rythmes puissants.

Au fil d’une évolution qui ne semble point parvenue en son terme, l’artiste se rapproche de plus en plus de l’abstraction lyrique.

Avec lui on n’est plus dans le milieu atmosphérique courant. Car il a le pouvoir de nous lancer dans l’imaginaire, en nous entraînant à travers le cosmos, davantage du côté du ciel, dirait-on que de la terre.

Son art robuste fait jaillir du chaos, ici des rayonnements de levers de soleil, là de phosphorescents combats géologiques.

Mystérieux tremblements ébranlant les entrailles de la planète.

Evasion du réel vers une surréalité informelle où l’on distingue un univers résolument « autre ».

Pierre ESPIL

Sud-Ouest